Le recours à la médiation avant tout procès
Depuis le 1er avril 2015, il est nécessaire de justifier d’une tentative de résolution amiable d’un conflit pour pouvoir accéder au Juge.
Cette nouveauté résulte du Décret n° 2015-282 du 11 mars 2015 portant simplification de la procédure civile et obligeant désormais les parties à recourir à une tentative de résolution amiable de leurs litiges en amont.
Sauf justification d’un motif légitime tenant à l’urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu’elle intéresse l’ordre public, l’assignation, la requête ou la déclaration qui saisit la juridiction de première instance doit préciser les diligences entreprises en vue d’y parvenir.
Cette disposition n’est pas prévue à peine de nullité de l’acte de saisine mais s’il n’est pas justifié de ces diligences lors de l’introduction de l’instance, le Juge pourra proposer aux parties une mesure de médiation ou de conciliation.
Cette proposition n’est qu’une faculté ouverte au juge mais gare à la partie demanderesse qui envisagerait de saisir une juridiction sans avoir tenté un rapprochement amiable ou sans être en mesure d’en justifier et qui s’aviserait de refuser la proposition du Tribunal sans se prévaloir d’un motif légitime !
Le temps du procès est trop long et certains diront que ces nouvelles dispositions ralentiront un peu plus la course au jugement.
Contrairement à d’autres pays qui ont développé avec succès le recours aux modes alternatifs de règlement des conflits, malgré des textes européens et nationaux applicables depuis de nombreuses années, les MARC ne font pas recette. La France avait pourtant précédé l’Europe en votant une Loi le 8 février 1995 instituant les médiations judiciaire et conventionnelle applicables notamment aux procédures civiles et commerciales, complétée depuis par la Directive européenne du 21 mai 2008 et l’Ordonnance du 16 novembre 2011.
La médiation n’est pas le seul moyen de mettre en musique la tentative de règlement amiable mais y recourir préalablement à l’engagement d’un procès permettra de respecter sans conteste les nouvelles obligations imposées par le texte du 11 mars 2015.
Une telle mesure permet aux parties de rechercher elles-mêmes la solution au litige qui les oppose, accompagnées en cela par un médiateur qui déroule avec eux un processus structuré. Elle est aussi bien applicable aux litiges survenant dans le monde des affaires que dans la sphère privée. La médiation est un mode de règlement très encadré, les différentes règles applicables ayant été insérées dans le Code de Procédure Civile.
Les échanges sont confidentiels, de sorte que les propositions effectuées de part et d’autre en vue de la recherche de la solution ne peuvent lier les parties en cas d’échec.
Le médiateur est un professionnel spécialement formé à ce mode de résolution des conflits. S’il peut se faire assister dans sa mission par un sachant en cas de complexité liée à la technicité du litige, il ne peut déléguer sa mission. Il doit la mener personnellement et s’entretenir avec chacune des parties. Il doit être impartial, indépendant des parties, neutre et doit réserver à tous les participants un traitement égalitaire. Il ne lui appartient pas de trouver la solution mais il déroule le processus permettant à chaque partie de s’exprimer, de faire valoir son point de vue, de reconnaître celui des autres et finalement d’inventer une solution.
Les intérêts de recourir à une telle mesure sont multiples.
Les parties conservent la maîtrise de la résolution du conflit aussi bien dans le calendrier que dans le résultat obtenu. Les concessions réalisées permettront de finaliser un accord et de l’exécuter dans des délais raisonnables sans être soumis à l’aléa inhérent à tout procès. Gain de temps, d’énergie et d’argent souvent.
Une telle mesure permet aussi de préserver les relations pour l’avenir contrairement à la poursuite d’un contentieux qui aura souvent pour conséquence de mettre un terme définitif aux relations précédemment engagées dans un cadre professionnel ou commercial ou d’obérer gravement celles-ci dans un cadre privé alors que les parties peuvent avoir à se rencontrer à nouveau et à collaborer ensemble. Quand un jour on a fondé une famille, on n’arrête pas d’être parents ensemble aux 18 ans de ses enfants mais on le reste pour toute sa vie et on a de multiples occasions de se le rappeler. Cette simple vérité mérite d’être rappelée quand l’on sait que des enfants passent une partie de leur jeunesse au milieu du conflit aigu de leurs parents et sont totalement instrumentalisés par cette lutte destructrice dont ils sont devenus les armes.
Les avocats des parties ont plus que jamais leur rôle à jouer dans le processus de la médiation aussi bien dans son déroulement que dans sa conclusion. Ils demeurent les conseils de leurs clients et ont toute leur place à leurs côtés. Une médiation réussie débouche sur la rédaction d’un protocole de médiation soumis à l’homologation du juge en vue de devenir exécutoire.
Le protocole doit envisager tous les points de droit applicables et en faire une juste application, ce qui n’est pas toujours le cas de protocoles rédigés à la va-vite par des parties néophytes. (La fixation de la résidence d’un enfant majeur au domicile de l’un de ses parents peut prêter à sourire si l’humeur est joyeuse…)
La complexité du droit et la sécurité juridique qui doit accompagner un tel protocole ne laisse pas la place à l’imprécision et les avocats des parties seront les rédacteurs désignés du protocole de médiation.
Sauf à ce qu’un protocole de médiation n’ait pas envisagé toutes les questions de droit ou donne lieu à des divergences d’interprétation et ne soit le nouvel objet d’un procès !
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